Text toys

– Je l’ai regardé fixement pendant plusieurs heures. Rien à faire. Toujours vierge à la fin de la journée. Je n’arrivais pas à reprendre mon inspiration. C’est la deuxième fois que ça m’arrive. J’avais beau tripoter mon stylo dans tous les sens, impossible de faire cracher son encre. La misère textuelle je te dis ! J’ai dû froisser, à moi seule, la moitié de la production arboricole de l’Amazonie… Et moi qui pensais que c’est simple comme un coup de Bic.

– Tu connais la cause ? Il y a souvent une raison aux pannes de rédaction. Tu vas t’en sortir. Ca arrive, ce n’est pas grave.

– Ouais, il paraît que c’est normal d’avoir moins envie avec les années mais là je crois que c’est la tête qui ne va pas. Tu sais ce qu’on dit : quand l’en-tête ne va pas, le corps 12 ne suit pas.

– Mais c’est samedi que tu dois balancer le billet. Comment vas-tu faire ?

– Oui. Je crois que je vais me stimuler avec des text toys genre mots fléchés, Scrabble… Faut que je lutte contre ma sécheresse lexicale avec un truc microsoft dans un premier temps et je passerai en mode hard word quand j’aurai retrouvé mon appétit textuel.


Vous êtes victime d’une panne textuelle ? Rien de grave. Cela arrive aux meilleurs d’entre-nous. J’en avais d’ailleurs parlé dans un précédent billet. Mais quand vient la deuxième panne, c’est le drame : on doute de son amour pour l’écriture, on se demande si on est bon, si n’a pas choppé une dyslexie en aidant ce môme en échec scolaire tous les samedis.

Alors comment faire pour retrouver une textualité épanouie ?

Pas besoin d’aller voir un textologue, il faut juste passer à la masturbation intellectuelle.

Texte préliminaire

Le principe est préparer le corpus textuel (sachez que si vous êtes bitextuel vous allez doublement galérer). Il est préférable de s’adonner à ce plaisir en solo car vous avez besoin de vous recentrer.

Mettez-vous en condition : lumière tamisée, musique douce, installez-vous confortablement pour éviter les crampes et commencez à laisser courir vos doigts fébriles sur un organe textuel (clavier ou cahier feront l’affaire). Caressez-le du bout de vos doigts et exercez de petites pressions délicates. Il ne faudrait pas froisser ou frapper votre organe. Laissez votre langue s’exprimer, abandonnez vos mots et couchez-les délicatement sur le papier encore vierge. Ne vous retenez pas, laissez libre-cours à votre imagination. A ce stade, vous sentez votre synopsis se gorger d’idées bien placées.

Pratique textuelle

Une fois l’esprit échauffé, vous pouvez prendre l’air pénétré et passer à la partie introductive.

Pas besoin de vous métamorphoser en obsédé textuel, vous pouvez alterner le texte oral, texte analogique (dit texte anal), ou encore le texte consensuel en ponctuant de petites circonvolutions sur la zone de texte qui vous excite le plus.

Faites défiler le texte de bas en haut, traitez-le, remaniez-le, comblez les textes à trous, votre maîtrise de la langue lui donnera du caractère.

Vous sentez le désir d’écrire monter en vous, des vagues successives de mots qui vous viennent à la bouche, vous prenez votre pied à en perdre l’en-tête ? Donnez tout ! Un texte poignant, hypertextuel, ça s’écrit haut et fort !

Il ne vous reste plus qu’à conclure.

Et puis si cela ne fonctionne pas vous pouvez toujours regarder un film orthographique.

Textuellement vôtre.

7 Comments

  1. Que dire à part : merveilleusement bien écrit ! Le côté tendancieux est manié avec énormément de talent tout en évitant la vulgarité.
    Tu viens de gagner une lectrice et une followeuse !

    Lili

  2. ding7

    Wouahhh, je viens d’avoir une rédaction… Humm… Ressaisissons nous sinon, rien qu’au souvenir de ton billet, je vais avoir envie d’y retourner pour mater chacun de tes mots…

    Superbe, merci 🙂

    Oups… I did it again…

  3. Ku Kaizi

    C’est un vrai régal de te voir jouer ainsi avec les mots!

  4. jimidi

    Des titres conseillés, pour les films orthographiques ?

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